Seconde journée du colloque scientifique à Bobo ,panel 2 : L’activité de la justice administrative au Burkina Faso

Les panelistes

La seconde journée du colloque scientifique des vingt ans des tribunaux administratifs a continué hier 28 octobre 2020 dans la ville de Sya avec un deuxième panel titré l’activité de la justice administrative au Burkina Faso. Ce panel a été piloté par trois panélistes et un modérateur.

La première thématique du panel intitulée valeur ajoutée du PMAP dans l’activité du Tribunal Administratif de Bobo-Dioulasso a été abordée  par M. Souleymane KERE.

De son exposé ponctué par une projection, plusieurs éléments retiennent l’attention. Aussi divers soient-ils, ces éléments essentiels peuvent néanmoins être amassés suivant un critérium tripartite : la situation des crédits du ministère de la justice, la présentation du Programme de Modernisation de l’Administration Publique (PMAP) et l’énumération des résultats engrangés dans le cadre exemplatif du Tribunal Administratif, TA, de Bobo.

La situation des crédits du ministère de la justice a été établie à un double niveau, avant et après la régulation budgétaire. Pour l’essentiel, M. KERE fait remarquer ici l’insuffisance des dotations nécessaires au bon fonctionnement des juridictions administratives sous les auspices de ce programme.

Le deuxième niveau de cette première communication du jour, relatif à la présentation du PMAP, a été consacré à l’énumération de quelques objectifs majeurs dudit programme. Il s’agit entre autres de l’amélioration du fonctionnement des tribunaux administratifs, départementaux et d’arrondissement, de l’amélioration de la gestion des ressources humaines des juridictions administratives,… Dans un souci de célérité pour manque de temps, la présentation du PMAP s’est achevée par un très bref exposé des données budgétaire à travers l’annuaire statistique laissant voir des montants élevés culminant plus de 35 milliards au niveau des dépenses notamment.

Enfin, M. Souleymane KERE a très rapidement passé en revue les résultats engrangés grâce au programme de modernisation de l’administration publique dans le cadre du TA de Bobo-Dioulasso. On y retrouve principalement le renforcement des qualités des acteurs de la juridiction, l’amélioration de la promptitude dans le traitement des dossiers, etc.

Karfa GNANOU : l’activité de la justice administrative du tribunal administratif de Bobo, de 1999-2019 : les grands sujets de droit traités.

 Dans ses propos introductifs, le Président du TA de la cité de Dafra a fait observer les différents types de contentieux traités par sa juridiction. Quatre sortes de contentieux se dégagent. La première catégorie de contentieux est le contentieux électoral qualifié par le communicateur de « contentieux cyclique »  car intervenant seulement au moment des processus électoraux. Le deuxième archétype de contentieux se réglant au TA de Bobo concerne le contentieux fiscal. Il est traité de « contentieux sporadique » par M. Karfa GNANOU du fait que ce contentieux est plus traité au TA de Ouagadougou qu’à celui de Bobo. Cette situation s’explique, selon le Président, par le fait que les règles de compétence territoriale en la matière font référence au lieu d’établissement de l’entité, de l’entreprise ; Ouaga comptant le plus important nombre d’entités économiques privées même si Bobo-Dioulasso reste toujours la capitale économique du pays. Le troisième type de contentieux est le contentieux de la commande publique dans lequel les principes comme le principe de l’efficacité et  celui de l’économie du contrat constituent des règles d’or. Le dernier modèle de contentieux est constitué de contentieux divers qui sont pour l’essentiel des contentieux des procès verbaux en matière de fonction publique. Pour clore son introduction, M. GNANOU a donné quelques chiffres d’affaires soumises de décisions rendues sur le fond dont 60 % se rapportait aux affaires foncières aux contentieux de la fonction publique.

Le fond de son allocution a abordé deux axes cruciaux de réflexion : la prédominance du contentieux foncier et la constance du contentieux de la fonction publique. Cette première ligne de réflexion a mis l’accent sur les compétences de juridiction et les qualités d’action des différentes parties rénovées grâce aux décisions du TA de Bobo-Dioulasso. Relativement à la qualité à agir, le tribunal administratif par sa décision sur l’absence de personnalité juridique de l’Eglise Catholique donc dépourvue de qualité à agir, a précipité la signature de la convention entre le Burkina Faso et l’Etat de Saint-Siège reconnaissant la personnalité juridique à ladite Église. S’agissant de la compétence de juridiction, le tribunal administratif a fait un élargissement ou du moins une mise en valeur de son champ de compétence territoriale en retenant en plus du lieu de la situation de l’immeuble, celui du lieu de  résidence du justiciable.

Le deuxième volet traitant de la constance du contentieux de la fonction publique a abordé les grandes thématiques juridiques élucidées par le juge administratif bobolais et les décisions retenant la responsabilité de l’administration. Parlant des grandes thématiques soulevées, le Président a souligné que le tribunal a dans plusieurs décisions retenu que « nul ne peut être sanctionné deux fois pour la même faute. »Il note également que la comparution d’un justiciable sans l’assistance de son conseil n’est pas considéré comme une violation des droits du justiciable mais plutôt comme portant atteinte aux droits de l’avocat car le citoyen peut se faire assister ou représenter par une personne de son choix que celle-ci soit avocat ou non or l’assistance et la représentation du citoyen est un droit accordé à la fonction d’avocat

Dans la dernière partie de sa communication c’est-à-dire relativement aux  décisions retenant la responsabilité pour faute de l’administration, le Président du TA de Bobo-Dioulasso, M. Karfa GNANOU s’est appesanti sur les ordres de mission. Il a laissé entendre que sa juridiction a été amené à trancher sur la responsabilité de l’administration y afférente. Le TA de Bobo a décidé notamment que « dès lors qu’un agent de la fonction publique dispose d’un ordre de mission signé, celui-ci peut se déplacer à chaque moment » de sorte à ce que tout accident dont il sera victime sera considéré comme accident de travail.

La jurisprudence administrative burkinabè, Dr Elvis SAVADOGO

Comme propos préliminaires, Dr SAVADOGO a souligné que jusqu’à une période relativement récente, il y a eu une indisponibilité très austère et une absence de systématisation des décisions des juridictions administratives au Burkina Faso. Il a aussi rendu un vibrant hommage à l’endroit du Professeur Salif YONABA qu’il n’hésite pas à considérer comme  »le Pape de la jurisprudence administrative burkinabè »

À introduction de sa communication, il a défini la jurisprudence administrative à l’aune des écrits de très réputés doctrinaires. Dr SAVADOGO a ainsi fait référence à trois conceptions de la jurisprudence administrative. La première approche tend à l’appréhender comme l’ensemble des décisions des juridictions administratives supérieures dotées d’une certaine solennité. Deuxièmement il note que la jurisprudence administrative peut s’entendre de l’ensemble des principes juridiques fondamentaux arrêtés par le juge administratif. Enfin, la troisième conception conçoit cette jurisprudence comme l’accumulation des décisions d’origines diverses mais convergeant vers la même solution juridique sur les mêmes sujets de droit administratif. Il a toutefois tenu à faire une réserve sur la dernière conception en soulignant qu’une seule décision en matière de justice administrative peut être considérée comme jurisprudence.

La substance de sa communication  reposait sur deux idées principales : Une jurisprudence administrative burkinabè cadenassée et une jurisprudence d’émancipation, qui se redéploie. Dans la première partie, Dr SAVADOGO a montré par l’entremise de plusieurs décisions du juge administratif burkinabè que la jurisprudence administrative burkinabè est inféodée à celle française dans la mesure où le juge administratif burkinabè a dans plusieurs décisions fait recours, des références à celles de son homologue français.

La seconde parie a toutefois tenté de dépeindre une jurisprudence administrative burkinabè qui s’émancipe en se départant souvent de celle de la France pour prendre en compte les réalités propres à la société burkinabè.

Pour la Revue Juridique du Faso

SOURA Baminissé

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