Qatar 2022 : quand les droits de l’homme sont sacrifiés à l’autel de la coupe du monde !

Il existe diverses manières de faire passer un message. Par le bruit, on peut faire entendre ce que l’on veut. Mais par le silence aussi on peut bien faire passer un message. Il est possible par exemple d’écrire quelque part ce que l’on veut faire entendre. C’est ce que certaines sélections nationales ont fait à l’occasion des éliminatoires de la coupe du monde Qatar 2022 .En effet, lors du match éliminatoire entre l’Allemagne et l’Islande, les joueurs allemands  portaient des T-shirts noirs avec une lettre gravée en blanc sur chacun et dont le tout formait le mot « Human Rights ». Une manière pour eux de condamner et d’interpeller  les autorités du Qatar sur l’exigence du respect des droits humains. Ce fut le cas aussi avec la sélection norvégienne. Plusieurs joueurs ont par ailleurs appelé au boycott de la coupe du monde qui doit se tenir au Qatar.

Mais  quel est le fond du problème ? Que reproche-t-on au Qatar ?

Sans doute les acteurs du football ne sont pas insensibles aux violations des droits de l’homme observées un peu  partout dans le monde. Ceux-ci se sont montrés touchés par les violations des droits de l’homme observées sur les chantiers des infrastructures de la coupe du monde 2022. Selon une enquête du média anglais ‘’The Guardian’’ publiée le 23 février dernier, au moins 6 500 travailleurs étrangers seraient morts dans les chantiers de construction, depuis 2010 l’année à laquelle  le Qatar a obtenu l’autorisation d’accueillir la coupe du monde. Selon les dénonciations de certaines ONG, les travailleurs étrangers  au Qatar sont exploités et travaillent dans des conditions assimilables au travail forcé ou à l’esclavage. Il n’y a pas de salaire minimum, ni de congés payés encore moins le droit de grève. Chaleur intense, chutes et insuffisance cardiaque sont pourtant les causes invoquées entre autres pour justifier ces morts selon les autorités qataries. Ces dernières nient toutes responsabilités sur cette hécatombe, expliquant qu’il n’y a que 37 décès parmi les 6500 qui sont liés à la construction du stade. Il est précisé par ailleurs que la majorité de ces ouvriers morts sont originaires de l’Asie du Nord. Un bilan macabre qui n’a pas laissé indifférents les footballeurs. S’il est difficile  de conclure que ces morts sont dus aux faits directs de l’Etat du Qatar, on peut néanmoins s’interroger sur sa responsabilité pour manquement à l’obligation de protection. Aujourd’hui, il est connu de tous que chaque Etat a l’obligation de protéger et de faire respecter les droits de l’homme au profit de toute personne vivant sur son territoire. L’on est alors tenté, au regard des faits, de dire que l’Etat du Qatar a manqué à son obligation  de garantir une  protection sociale à des conditions de vie permettant à toute personne de jouir du meilleur état de santé physique et mental comme le recommande l’article 12.1 de la  déclaration universelle des droits de l’homme. Une obligation que les autorités ne peuvent ignorer vu que le pays est membre de l’ONU depuis 1971. Notons que dans ce sens le rapporteur spécial de l’ONU sur les droits de l’homme s’était dit préoccupé par la situation des travailleurs au Qatar en septembre dernier et a demandé que soit fixé un salaire minimum. Le Parlement européen avait lui aussi demandé aux autorités qataries, à travers une résolution, de ratifier la convention des travailleurs migrants, le pacte international relatif aux droits civils et politiques, le pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels ainsi que la convention de l’OIT. Aucun de ces instruments juridiques internationaux n’a jusque-là été adopté par le pays. Mais les autorités  affirment avoir pris, en février dernier en collaboration avec l’OIT, des mesures visant à respecter le bien-être des travailleurs migrants. Vu sous l’angle du droit international,  il n’est pas exclu que la responsabilité du Qatar soit engagée, afin de le voir condamner à dédommager les familles de victimes et les survivants.

Par Augustin SANKARA

La rédaction

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