La démocratie selon Abraham Lincoln est le gouvernement du peuple par le peuple et pour le peuple. Ce qui veut dire donc que c’est le peuple qui est le titulaire du pouvoir et qu’il est exercé à son profit. C’est sans doute ce qui justifie la tenue des élections dans tous les Etats qui ont choisi la démocratie comme état social.
Mais, force est de reconnaître aujourd’hui que la démocratie ne se résume pas aux différentes élections. En effet, la démocratie exige au-delà de la participation des citoyens au choix des dirigeants, la reconnaissance et l’exercice de certaines libertés fondamentales. Au nombre desquelles on peut retenir la liberté d’expression.
La liberté d’expression est donc une liberté fondamentale puisqu’elle se trouve consacrée dans la constitution de certains Etats. L’article 8 de la Constitution de Burkina Faso du 11 juin 1991 en est une parfaite illustration. En effet, ledit article dispose que : « Les libertés d’opinion, de presse et le droit à l’information sont garantis. Toute personne a le droit d’exprimer et de diffuser ses opinions dans le cadre des lois et règlements en vigueur ».
Au plan international , elle est consacrée et définie par l’article 19 de la déclaration universelle des droits de l’homme de 1948 en ces termes : « tout individu a droit à la liberté d’opinion et d’expression, ce qui implique le droit de ne pas être inquiété pour ses opinions et celui de chercher, de recevoir et de répandre, sans considérations de frontières, les informations et les idées par quelque moyen d’expression que ce soit ».
Au plan régional africain, la liberté d’expression est non seulement consacrée par la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples de 1981 mais aussi par la déclaration de principe sur la liberté d’expression en Afrique. Cette dernière déclare que la liberté d’expression est un droit fondamental et inaliénable et un élément indispensable de la démocratie. Elle conclut donc que :« Tout individu doit avoir une chance égale pour exercer le droit à la liberté d’expression et à l’accès à l’information, sans discrimination aucune ».
Au-delà de cette garantie normative, la liberté d’expression bénéficie d’une garantie juridictionnelle assurée par la justice judiciaire et la justice constitutionnelle.
Au plan national, elle fait l’objet d’une règlementation de la part du législateur. En effet, par une loi, le législateur peut intervenir pour fixer le cadre dans lequel elle doit s’exercer.
La liberté d’expression est l’une des concrétisations de la liberté de pensée au sens large. En effet, la liberté d’expression est un prolongement de la liberté de pensée dont elle n’est autre que la manifestation extériorisée » .
La liberté d’expression elle se concrétise à son tour à travers la liberté de la presse. C’est ce qui justifie sans doute que chronologiquement la liberté d’expression a été reconnue en France par la révolution française de 1789 alors que la liberté de la presse n’a été reconnue qu’en 1881. La liberté de la presse signifie que les médias sont libres.
Mais ,aussi important soit-elle la liberté d’expression ou la liberté tout court ne saurait être absolue dans la mesure où la définition de liberté en elle-même comporte déjà des restrictions. En effet, étant souvent définie comme le pouvoir de faire ce qui ne nuit pas à autrui, il va sans dire que la liberté d’expression ne permet pas de faire tout ce qu’on veut ou de dire tout ce qu’on veut, comme on veut et n’importe comment. L’exercice de la liberté d’expression doit donc se faire de manière à ce qu’elle ne puisse pas nuire aux droits et libertés des autres.
L’Etat peut donc prendre des mesures pour s’assurer que la liberté d’expression de certains ne porte pas préjudice aux droits et libertés des autres étant donné qu’une telle situation pourrait être source de conflits incessants. Aussi, l’Etat en tant que puissance publique garant de la paix sociale et de l’ordre public n’est–il pas autorisé à prendre des mesures de restrictions à cette liberté dans la mesure où la paix sociale ou l’ordre public pourrait être compromis ?
A priori il y a lieu de distinguer deux situations qui, dans les Etats démocratiques et de Droit les pouvoirs de l’Etat ne sont pas les mêmes. Il s’agit des situations ordinaires et des situations exceptionnelles.
Les constitutions des Etats prévoient généralement des situations exceptionnelles dans lesquelles les pouvoirs des autorités sont plus importants.
En matière de liberté d’expression, en situation ordinaire, l’Etat sur le fondement de la constitution peut prendre des mesures pour encadrer l’exercice de la liberté d’expression. Mais il n’est pas exclu que dans le cadre de cette règlementation, le législateur ,puisque c’est lui qui a ce pouvoir aille jusqu’à restreindre cette liberté, voire la dénaturer, d’où l’importance de la justice constitutionnelle.
Par contre dans les situations exceptionnelles, par exemple les situations de troubles extrêmes ou de grève, l’Etat peut prendre des mesures nécessaires pour restreindre la liberté d’expression. Il s’agit des mesures qui dans des situations ordinaires feront l’objet d’une censure de la part du juge constitutionnel. Ces restrictions sont dites légitimes. Il importe donc de préciser que la légitimité du motif invoqué par l’Etat au soutien de sa mesure restrictive s’apprécie souverainement par le juge lorsqu’il est saisi d’un recours par les titulaires de la liberté d’expression.
La Rédaction
Site web :www.revuejuris.net
Mail :redaction@revuejuris.net
Tel :+75 75 78 54/70 95 54 66