Le 16 février 2022, dans la salle de l’AUF, monsieur DOLLY Mathias, magistrat, a soutenu sa thèse de doctorat sur le thème : contrôle juridictionnel de la commande publique : Essai sur la fonction régulatrice de l’office du juge administratif. Les travaux de recherche ont été effectués sous la direction du professeur Seni Mahamadi OUEDRAOGO, Professeur titulaire de droit public. Le jury de soutenance était constitué du Professeur Augustin LOADA en qualité de président, du professeur Seni OUEDRAOGO, directeur de thèse et des professeurs Meissa DIAKHATE, Robert MBALLA OWONA et Djibrihina OUEDRAOGO en qualité de rapporteurs.
En substance, le candidat au grade de docteur a opiné sur la problématique du rôle et de la position du juge administratif en matière de commande publique. Il a d’emblée fait remarquer que cette problématique résulte d’un triple constat. En fait, elle résulte du constat selon lequel il y a un quasi-monopole de l’exécutif dans la normalisation du système de commande publique. Ce premier constat invite à se demander si l’apanage du gouvernement dans la normalisation, part importante de la régulation du secteur de la commande publique, ne relègue le juge au second plan.
Elle se justifie aussi par la montée en puissance de l’ARCOP, autorité administrative indépendante à qui le législateur a donné une compétence exclusive en matière de régulation de la commande publique justifie également ce questionnement. Il s’agit là d’un constat qui invite à se demander si la création de l’ARCOP n’a pas pour effet d’éclipser les juges. Par ailleurs, le caractère fondamentalement contractuel du contrat de commande publique invite aussi à s’interroger sur la place et le rôle du juge dans le contrat, seule loi des parties eu égard au principe de l’autonomie de la volonté. A ce titre, il se pose la pertinente question de savoir si la primauté de la volonté contractuelle, loi des parties n’oblige pas le juge à la passivité dans la gestion des situations de crise en matière de contrat de la commande publique.
Se prononçant sur ces questions, le candidat est parvenu à la conclusion qu’en dépit de tout, le juge administratif joue un rôle régulateur dans la commande publique. Cela parce qu’ « au regard de ses attributions et du déploiement de son office en matière de commande publique, le juge administratif joue le rôle et occupe la place de régulateur de la commande publique. »
Il a expliqué que la fonction régulatrice du juge va au-delà du contrôle du cadre normatif de la commande publique pour s’établir dans le lien contractuel une fois qu’il est scellé. Cela parce que le contrat ne constitue plus, par principe, et en toutes hypothèses, un rempart fiable destiné à préserver la sécurité juridique et la bonne situation économique des cocontractants et ayant comme essence, le maintien d’un équilibre intact pendant la durée du contrat. Le juge est donc un secours utile dans le maintien de l’équilibre contractuel ou au rétablissement de cet équilibre en présence de chocs endogènes (vice du contrat ou incurie des parties) ou exogènes (circonstances extérieures engendrant des dépenses supplémentaires).
Les juges contribuent, en effet, à maintenir ou à rétablir un équilibre contractuel en présence de chocs endogènes ou exogènes.
D’après lui, les prérogatives de l’exécutif dans la normalisation du secteur des marchés publics ne réduisent pas le rôle d’appui des juges. Cela, parce que « sauf inaction des justiciables, le juge est celui qui scrute la légalité des actes règlementaires, lesquels ne peuvent être mise en application que s’ils ne sont pas frappés par une ordonnance de suspension ou un arrêt d’annulation émanant du Conseil d’Etat. ».
Il a aussi indiqué que la présence de l’ARCOP ne signifie pas l’éclipse des juges ; car « aucune action administrative ne peut échapper au juge ». D’autant plus que, celui-ci « travaille à accroitre sa zone d’influence sur l’action administrative à travers la mitigation de l’accès à son prétoire et à l’accroissement jurisprudentiel de ses pouvoirs. »
Monsieur DOLLY a soutenu que la primauté de la volonté contractuelle contenue dans le contrat de commande publique limite la position passive du juge. En fait, le juge se voit obliger, parfois, d’assumer la fonction de juge des contrats. Le juge est le collaborateur des parties. D’autant plus que, l’objectif de l’intérêt poursuivi par le présent contrat de cautionnement autorise le juge à exercer la fonction incisive que lui suggèrent certaines décisions judiciaires.
Ce faisant, il a soutenu que le juge administratif est l’ultime régulateur, c’est-à-dire le dernier et le plus haut degré de la régulation de la commande publique au Burkina Faso.
Le jury, visiblement très satisfait du rendu des recherches du candidat, a salué l’œuvre avec la mention très honorable.
Par Noufou ZOROME
revuejuris.net