La légitime défense


Arrêt:

Crim .18 juin 2002,JCP 2002,I,103

Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 122-5 du code pénal ,591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motif, manque de base légale ;
En ce que l’arrêt attaqué a relaxé Pierre Y. des fins de la poursuite engagée à son encontre du chef d’accusation de violences volontaire ayant entrainé une incapacité temporaire totale de travail personnel de 8 jours sur mineure de quinze ans ;
Aux motifs qu’il est établi qu’Aurèlie X. a chu sur son séant en essayant de forcer le passage que Pierre Y., dans l’exercice de ses fonctions, interdisait par sa présence physique ;
qu’Aurèlie Vexée ,a alors traité son professeur de « bàtard ,fils de pute,conard » ;qu’en riposte à ses injures Pierre Y ; l’a réprimandée, accompagnant ses paroles d’un léger coup de pied dans la jambe gauche de celle-ci ; que ce dernier geste de Pierre Y. ,qui en soit pouvait constituer une infraction, n’est pas punissable car il n’est qu’une défense légitime et proportionnée à l’attaque verbale injurieuse et injustifiée d’Aurèlie X. qui tentait de le déstabiliser physiquement en forçant le passage ;
Alors, d’une part, que l’état de légitime défense n’est caractérisé que lorsque l’acte de violence, commis par la personne prétendant agir en état de légitime défense, a été commandé par l’impérative nécessité de repousser une agression réelle, actuelle et injuste ; qu’une simple attaque verbale, ne constitue pas un risque d’agression réel et actuel justifiant une riposte, par un adulte, portant atteinte à l’intégrité physique d’une adolescente ; qu’en l’espèce, en considérant que le prévenu, qui avait frappé une de ses élèves en train de l’insulter tout en étant à terre, avait agi en état de légitime défense, la cour d’appel a violé l’article 122- 5 du Code pénal ;
Alors, d’autre part, que les moyens de défenses employés par la personne prétendant agir en état de légitime défense doivent être nécessaires et proportionnés à la gravité de l’atteinte actuelle exercée à son encontre ; que la riposte d’un professeur portant atteinte à l’intégrité physique d’une de ses élèves est manifestement disproportionnée à la simple attaque verbale dont il faisait l’objet et contre laquelle il n’était pas nécessaire de réagir par un acte de violence physique ;qu’en accordant pourtant le fait justificatif de légitime défense à Pierre Y. ,la cour d’appel a violé l’article 122- 5 du Code pénal ;
Attendu que, pour relaxer Pierre Y., professeur d’éducation physique, les juges du fond, par motifs propres et adoptés, relèvent que les douleurs lombaires dont font état les certificats médicaux ne peuvent lui être imputées ;
Qu’ils retiennent qu’après avoir tenté de forcer le passage, Aurèlie X. l’a insulté en termes grossiers et blessants et a jeté son cartable dans sa direction ;
Qu’ils ont alors estimé que le léger coup donné à la jambe de l’élève a été une riposte proportionnée à cette attaque ;
Attendu qu’en se déterminant ainsi par des motifs relevant de leur appréciation souveraine, les juges de fond ont justifié la relaxe ;
D’où suit que le moyen ne saurait être admis ; rejette le pourvoi.

Analyse et plan détaillé

La décision soumise à analyser a été rendue le 18 juin 2002 par la chambre criminelle de la cour de cassation française. Elle a été publiée au premier numéro du jurisclasseur périodique de l’an 2002 sous le numéro 103. Il s’agit d’un arrêt de rejet portant sur un des faits justificatifs écartant la responsabilité pénale, en l’occurrence la légitime défense. Des faits, il ressort qu’une mineure de quinze ans a subi un léger coup volontaire de la part de son professeur, ce dernier ayant ainsi réagi aux injures que lui adressait la jeune demoiselle qui tentait de forcer le passage. La demoiselle X a engagé contre le sieur Y des poursuites judiciaires devant les juges de fond Cour dans l’objectif de le faire condamner pour violences volontaires ayant entrainé une incapacité temporaire totale de travail personnel de huit Jours. Cependant, cette demande n’a pas été accueillie par la juridiction d’appel qui a plutôt relaxé le sieur Y. C’est ainsi que la demoiselle X s’est pourvue en cassation contre la décision de la Cour d’appel. C’est cette saisine de la Juridiction de cassation qui a donné lieu au présent arrêt de la Cour objet de notre étude. Pour obtenir l’annulation de l’arrêt de la Cour d’appel, la demoiselle X avance que l’arrêt de la Cour d’appel viole les articles 122-5 du code pénal,591 et 593 du code de procédure pénale. Cela parce que l’acte de violence du sieur Y ne constitue pas une riposte en état de légitime défense contrairement à ce qu’ont retenu les juges de fond. En effet pour la Cour d’appel le coup porté par le sieur Y a bien été donné en état de légitime défense du fait que l’acte en question est proportionné à l’attaque verbale et injurieuse de la jeune demoiselle. De ces oppositions de thèses et de prétention se dégageait la question de droit suivante : une violence verbale est-elle constitutive d’une réponse proportionnée et nécessaire de nature a légitimé une attaque opposée à cette violence ? C’est à cette question que la haute juridiction de l’ordre judiciaire était amenée à apporter une réponse. Répondant à cette question, la chambre criminelle de la Cour de cassation est allée dans le sens de l’arrêt des juges de fond en déclarant qu’une atteinte physique ne peut en aucun cas être retenue comme proportionnée et nécessaire face à une simple agression verbale. Cependant, elle a estimé que les juges de fond ont souverainement considéré le coup du sieur Y comme une riposte au jet du cartable par la demoiselle X proportionné et nécessaire au lancer de projectiles d’où il s’ensuit pour la Cour que la relaxe du sieur Y est justifiée, entrainant du même coup le rejet du pourvoi du demandeur.
Cette conclusion de la Cour mérite d’être analysée relativement aux conditions de l’état de légitime défense. Il conviendra donc à la suite de cette réflexion d’analyser d’une part les critères de l’acte d’agression (I) et d’autre part les critères relatifs à l’acte de riposte(II).

Plan proposé:

I. Une agression à trois caractères

L’acte d’agression doit revêtir d’une part, un trait réel et actuel(A) et d’autre part une connotation injuste(B).

A. Une agression nécessairement réelle et actuelle

B. Une agression injuste

II. Un acte de défense strictement défini

La riposte doit satisfaire à deux caractères essentiels. Il s’agit en l’occurrence de la nécessité de la riposte et sa proportionnalité avec l’agression(B).

A. Une défense commandée par la nécessité

B. Un acte de défense proportionnel à l’attaque

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