Des circonstances exceptionnelles extrêmes et imprévisibles peuvent amener un Etat, sur un territoire donné, pour une durée déterminée, à une restriction des lois, réputées démocratiques, et jugées insuffisantes pour faire face à un danger public en cours ou imminent, contrairement aux normes de l’Etat de droit courant. Ces circonstances exceptionnelles conduisant à des restrictions sont connus sous le vocable « état d’urgence ». Ces restrictions peuvent avoir des origines aussi diverses que variées dont celle sanitaire.
Des circonstances exceptionnelles extrêmes et imprévisibles peuvent amener un Etat, sur un territoire donné, pour une durée déterminée, à une restriction des lois, réputées démocratiques, et jugées insuffisantes pour faire face à un danger public en cours ou imminent, contrairement aux normes de l’Etat de droit courant. Ces circonstances exceptionnelles conduisant à des restrictions sont connus sous le vocable « état d’urgence ». Ces restrictions peuvent avoir des origines aussi diverses que variées dont celle sanitaire.
Les origines sanitaires étant à la base des restrictions imposées par l’état d’urgence sont tout aussi réelles que le monde connait aujourd’hui une grave crise sanitaire causée par le pathogène et contagieux coronavirus (covid-19), conduisant ainsi certains Etats à déclarer « L’état d’urgence sanitaire ». Cette expression ainsi que tout ce qui en découle peut paraitre inédite du faite de son caractère non usuel et donc nous amène à nous interroger sur ce que c’est concrètement que l’état d’urgence sanitaire. Pour étayer nos propos, nous nous pencherons sur le cas d’Etats qui en sont arrivé à cette situation d’urgence sanitaire. Ce sont la France et le Burkina Faso.
L’état d’urgence sanitaire n’est pas rigoureusement définit par des textes mais il est communément admis que c’est une situation exceptionnelle conduisant un Etat à prendre des dispositions exceptionnelles qui, décidées en conseil des ministres, doivent permettre de faire face à une catastrophe sanitaire mettant en péril la nation.
Comme annoncé plus haut, plusieurs pays dont la France et le Burkina Faso ont successivement décrété une situation d’urgence sanitaire. Ces décisions s’inspirent ou ont pour fondement en France, la Loi du 3 avril 1955 relative à l’état d’urgence. En bref, cette loi avait été voté pour faire face aux évènements liés à la guerre d’Algérie et n’était qu’une des pièces d’un dispositif plus large, avec notamment la loi du 16 mars 1956, dite « des pouvoirs spéciaux ». Précisons que jusqu’ici, la base légale utilisée reposait essentiellement sur l’article 3131-1 du code de la santé publique. Cet article avait été jugé insuffisant car il confère trop de pouvoirs au seul ministre de la santé. Compte tenu de l’ampleur considérable de la crise qui impliquait des mesures nationales sur le long terme et touchant une très grande quantité de situations, il a été jugé préférable de se doter d’une nouvelle loi afin de fonder un régime plus solide notamment pour l’encadrement des mesures d’exception restreignant les libertés. La décision burkinabé est conforme à l’article 66 de la Loi n023/94/ADP du 19 mai 1994 portant code de santé publique. Cet article dispose que : « En vue d’enrayer tout danger de
propagation de maladies, transmissibles, il pourrait être pris un décret sur proposition du Ministre chargé de la santé, instituant l’état d’alerte sanitaire dans une localité ou une région, dans ce cas, des mesures obligatoires d’hygiène et de prophylaxie sont appliquées durant une période déterminé et renouvelable au besoin ».
En France, c’est le parlement qui a voté un texte d’urgence pour faire face à l’épidémie de covid-19 qui instaure ce régime d’urgence sanitaire dénommé « Loi n02020-290 du 23 mars 2020 d’urgence pour faire face à l’épidémie de covid-19 » et réputée être « un dispositif inédit » et dont les mesures seront soumises au contrôle du juge et du parlement. Très succinctement, cette loi connait dans sa structure quatre grands titres énumérant au totale 22 articles. La loi d’urgence sanitaire est aussi suivie d’une série de mesures exceptionnelles dont déjà 25 ordonnances1 visant à faire face à la situation économique et sociale du pays. Leur but ? Renforcer la sécurité sanitaire et lutter contre la propagation de l’épidémie de coronavirus sur le territoire français.
Comment en arrive-t-on à la déclaration d’un état d’urgence sanitaire ?, l’article L.3131-13 nous éclaire en disposant comme suit : « L’état d’urgence sanitaire est déclaré par décret en conseil des ministres pris sur le rapport du ministre chargé de la santé. Ce décret motivé détermine la ou les circonscriptions territoriales à l’intérieur desquelles il entre en vigueur et reçois application. Les données scientifiques disponibles sur la situation sanitaire qui ont motivé la décision sont rendus publiques. ».
Au titre des pouvoirs, ce texte donne la compétence au premier ministre de prendre par décret toute une série de restrictions des libertés publiques d’aller et de venir, de réunion et d’entreprise. Plus concrètement, il s’agit d’une dizaine de mesures pouvant être prise au titre de l’article L. 3131-15 de cette loi. Le gouvernement peut : Restreindre ou interdire la circulation des personnes et des véhicules dans les lieux et aux heures fixés par décret ; Interdire aux personnes de sortir de leur domicile sous certaines réserves ; Ordonner des mesures ayant pour objet la mise en quarantaine ; Ordonner des mesures de déplacement de maintien en isolement ; Limiter ou interdire les rassemblements ; Ordonner la fermeture provisoire d’une ou plusieurs catégories d’établissements recevant du public…
1 Le dossier de presse sur la présentation des 25 premières ordonnances prise en application de la loi d’urgence pour faire face à l’épidémie de COVID-19 est téléchargeable sur : www.justice.gouv.fr/le-ministere-de-la-justice10017/covid-19-présentation-des-ordonnances-33031.html
De son côté, le ministre de la santé est habilité à prendre, par arrêté, toute mesure relative à l’organisation et au fonctionnement du dispositif de santé « à l’exception des mesures prévues à l’article L. 3131-15 visant à mettre fin à la catastrophe sanitaire… » Art. L. 3131-16 et suivants.
Par ailleurs, la loi d’urgence sanitaire prévoit en son article L. 3131-19 que lorsque l’état d’urgence sanitaire est déclaré, un comité scientifique est immédiatement réuni. Ce comité qui éclaire les choix du gouvernement dans la gestion de la crise rend périodiquement son avis sur les mesures prises en vertu de la situation d’urgence. Ce comité est dissous lorsque prend fin l’état d’urgence sanitaire.
Cette situation est accompagnée de mesures d’aides provisoires envisagées au Titre de « Mesures d’urgence économique et d’adaptation à la lutte contre l’épidémie de covid-19 ». Il s’agit notamment : D’aider et de soutenir la trésorerie des entreprises afin de limiter les faillites et les licenciements ; D’adapter le droit du travail pour permettre aux entreprises de faire face aux difficultés d’organisation auxquelles elles sont confrontées ; De modifier le droit des procédures collectives et des entreprises en difficultés afin de mieux anticiper les défaillances d’entreprises ; D’alléger le droit des sociétés …
La violation des règles de confinement est punie d’amende pouvant aller jusqu’à 10 000 euros et d’une peine de six (06) mois d’emprisonnement. La violation de certaines interdictions ou obligations conduisent à d’autres peines mentionnées tout au long des cinq (05) alinéas de l’article L. 3136-1.
L’état d’urgence sanitaire, en vertu de l’article L. 3131-13 du code de santé publique peut être déclaré pour une durée maximale d’un (01) mois. Mais spécifiquement pour l’épidémie en cours de coronavirus, l’état d’urgence sanitaire est déclaré pour une durée de deux (02) mois par dérogation de l’article 4 de la loi n02020-290 d’urgence pour faire face à l’épidémie de covid-19, dès son entrée en vigueur. Sa prorogation au-delà ne pourra être autorisée que par une nouvelle Loi. Il peut y être mis fin avant les deux mois par décret en conseil des ministres. L’état d’urgence sanitaire entre en vigueur sur l’ensemble du territoire national. Toutefois, un rapport du ministre de la santé peut conduire à un décret en conseil des ministres pour limiter l’application à certaines circonscriptions territoriales.
Il faut dire enfin que des garde-fous existent. Ainsi, l’Assemblée nationale et le Sénat devront être informés « sans délais » (article L. 3131-13) des mesures prises pendant l’état d’urgence.
Relativement au Burkina Faso, ce n’est pas tant une Loi d’urgence pour faire face à l’épidémie de covid-19 qui a été voté qu’il a été décidé en conseil des ministres en date du 26 mars 2020 au titre de la gestion de la riposte à la pandémie du coronavirus (covid-19) de déclarer « l’état d’alerte sanitaire ». Cela conformément au code de santé publique comme précisé plus haut. Ce régime est inspiré et se fait accompagné de mesures telles que : La mise en quarantaine pour une durée de deux (02) semaines, de huit (08) villes dont la capitale Ouagadougou afin de restreindre les libertés d’aller et de venir des populations ; La fermeture tous les types d’établissements d’enseignements sur toute l’étendue du territoire national ; L’interdiction de regroupement de plus de 50 personnes ; L’instauration d’un couvre-feu sur toute l’étendue du territoire ; La fermeture des frontières terrestres, ferroviaires et aériennes …
En cas de violation des mesures prises dans le cadre de l’état d’urgence sanitaire, la Loi n023/94/ADP portant code de santé publique prévoit en son article 67 que : « Toute infraction à ces mesures sanitaires est passible d’une amende de cinq mille (5000) à trente mille (30 000) francs CFA et d’un emprisonnement de cinq (5) à quinze (15) jours ou de l’une de ces deux peines seulement »
La durée de l’état d’urgence n’est pas été spécifiée à l’article 66 de la Loi n023/94/ADP portant code de santé publique qui énonce simplement que les mesures obligatoires d’hygiène et de prophylaxie sont appliquées « durant une période déterminé et renouvelable au besoin ». La confusion est encore plus grande quand l’une des mesures prise au conseil des ministres consiste en « Un prolongement de deux semaines de toutes les restrictions qui arriveraient à terme durant l’état d’alerte sanitaire. »
En tout état de cause il ne faut pas confondre l’état d’urgence sanitaire à l’urgence de santé mondiale, décrété par l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) le 30 juin 2020 qui est une action internationale coordonnée par un comité d’urgence aidant les 193 Etats membres de l’ONU à se préparer à agir face à des situations pouvant impacter la santé publique.
Par:NOMBRE David Adnan
La rédaction
Revue Juridique du Faso
1.Le dossier de presse sur la présentation des 25 premières ordonnances prise en application de la loi d’urgence pour faire face à l’épidémie de COVID-19 est téléchargeable sur : www.justice.gouv.fr/le-ministere-de-la-justice10017/covid-19-présentation-des-ordonnances-33031.html.
2.
Bonjour, merci pour l’initiative de nous éclairer.
Cependant, je pense qu’il y a un lapsus au niveau des sanctions à la violation des mesures de l’état d’urgence sanitaire. C’est écrit « empoisonnement « , mais je pense que vous avez voulu écrire « emprisonnement ».
Merci à vous