I. ENTRÉE EN FONCTION ET DÉROULEMENT DE LA CARRIÈRE
Question n°1. Comment se fait le recrutement du juge constitutionnel camerounais ?
Réponse. Les onze (11) membre du Conseil constitutionnel sont nommés conformément aux dispositions de l’article 51 alinéa 2 de la Constitution du 18 janvier 1996. Selon cet article, les membres du Conseil constitutionnel sont choisis parmi les personnalités de réputation professionnelle établie, et doivent jouir d’une grande intégrité morale et d’une compétence reconnue. Ces onze (11) membres sont alors désignés de la manière suivante :
– trois (03), dont le Président du Conseil, par le Président de la République ;
– trois (03) par le Président de l’Assemblée Nationale après avis du bureau ;
– trois (03) par le Président du Sénat après avis du bureau,
– deux (02) par le Conseil supérieur de la magistrature.
En plus de ces onze (11) membres statutaires prévus ci-dessus, les anciens Présidents de la République sont, de droit, membres à vie du Conseil constitutionnel.
Question n°2. Quel titre porte le membre du Conseil constitutionnel ?
Réponse. Le membre du Conseil constitutionnel porte titre de « Conseiller ».
Question n°3.Existe-t-il des conditions de formation, d’expérience professionnelle ou de compétence juridique pour être nommé au Conseil constitutionnel ?
Réponse. Aucune condition juridique n’est expressément exigée pour être nommé comme conseiller au Conseil constitutionnel. Seulement, outre la condition de « réputation professionnelle établie » qui est exigée, il faut être de bonne moralité et jouir d’une grande probité. (Art.51 alinéa 1 de la Constitution).
Question n°4. Existe-t-il des conditions d’âge minimal ou maximal pour y être nommé ?
Réponse. Aucune condition d’âge n’est fixée.
Question n°5. Quelle est la durée du mandat ?
Réponse. Les membres du Conseil constitutionnel sont nommés pour un mandat de six (06) ans éventuellement renouvelables. (Article 51 alinéa 1 de la Constitution).
II. STATUT DU JUGE CONSTITUTIONNEL CAMEROUNAIS
Question n°1. Le juge constitutionnel est-il révocable ? Si oui, pour quels motifs, par qui et selon quelle procédure ?
Réponse. Le régime d’inamovibilité trouve son fondement non pas dans la Constitution mais plutôt dans la loi n°2004/005 du 21 avril 2004 portant statut des membres du Conseil constitutionnel. Ainsi aux termes de l’article 9 de cette loi, « les membres du Conseil constitutionnel sont inamovibles. Leur mandat ne peut être ni renouvelé, ni révoqué ». Sauf cas de flagrant délit. Dans ce cas, le président du Conseil et éventuellement les autres conseillers doivent être saisis pour juger de l’opportunité de la levée de l’immunité. En règle générale, l’immunité d’un conseiller ne peut être levée que par un vote de ses pairs à la majorité des 2/3, dans les huit jours de la saisine du Président du Conseil constitutionnel par le Ministre chargé de la justice.
Question n°2. Le juge constitutionnel doit-il prêter serment avant son entrée en fonction ? Si oui devant quelle autorité ?
Réponse.Avant leur entrée en fonction, les membres du Conseil constitutionnel prêtent serment au cours d’une cérémonie solennelle devant les deux chambres du parlement réuni en congrès. Ainsi, ils « prêtent serment suivant, la main gauche posée sur la Constitution et la main droite levée et dégantée devant le drapeau national » en disant : « Je jure de bien et fidèlement remplir mes fonctions, de les exercer en toute impartialité dans le respect de la Constitution, de garder le secret des délibérations et des votes, de ne prendre aucune position publique, de ne donner aucune consultation sur les questions relevant de la compétence du Conseil ». Cela étant, tout manquement à la prestation du serment constitue un acte de forfaiture et est puni conformément à la législation en vigueur. (Article 51 alinéa 4 de la Constitution).
Question n°3.Quelles sont les incompatibilités prévues avec la fonction de juge constitutionnel ?
Réponse. Les fonctions des membres du Conseil constitutionnel sont incompatibles avec la qualité de membre du gouvernement, la qualité de membre du Conseil économique et social, la qualité de membre de la Cour suprême. (Article 51 alinéa 5 de la Constitution). En plus de ces incompatibilités ci-dessus prévues par la Constitution, la loi du 21 avril 2004 portant statut des membres du Conseil constitutionnel prévoit d’autres types d’incompatibilités. A cet effet, l’exercice de tout emploi public, civil ou militaire, l’exercice de tout mandat électif, toute autre activité professionnelle privée pouvant affecter son honorabilité, son impartialité, son intégrité, sa neutralité et son honnêteté intellectuelle sont incompatibles avec les fonctions de membre du Conseil constitutionnel. (Article 8 alinéa 1 de la loi n°2004/005 du 21 avril 2004 portant statut des membres du Conseil constitutionnel).
III. ATTRIBUTIONS ET SAISINE DU CONSEIL CONSTITUTIONNEL
Question n°1. Qui peut saisir le Conseil constitutionnel ?
Réponse. Le Conseil constitutionnel est saisi par le Président de la République, le président de l’assemblée nationale, le président de sénat, un tiers des députés ou un tiers des sénateurs » En plus de ceux-là, « les présidents des exécutifs régionaux peuvent saisir le Conseil constitutionnel lorsque les intérêts de leurs régions sont en cause ». (Article 47 alinéa 2 de la Constitution).
Question n°2. Quelles sont les attributions du Conseil constitutionnel ?
Réponse. Le Conseil constitutionnel n’a pas moins de six (6) attributions à savoir :
– le contrôle de la constitutionnalité des lois, des traités et accords internationaux ;
– le contrôle de la constitutionnalité des règlements intérieurs de l’Assemblée Nationale et du Sénat, avant leur mise en application, quant à leur conformité à la Constitution ;
– le règlement des conflits d’attribution : entre les institutions de l’Etat ; entre l’Etat et les régions ; entre les régions.
– le contrôle de constitutionnalité des traités et accords internationaux avant leur mise en application.
– le Conseil Constitutionnel veille à la régularité de l’élection présidentielle, des élections parlementaires, des consultations référendaires. Il en proclame les résultats. (Article 48 alinéa 1 de la Constitution).
En plus de ces fonctions souveraines, le Conseil constitutionnel est aussi compétent pour :
– constater la vacance à la Présidence République.
– donner des avis sur des matières relevant de sa compétence.
IV.OBLIGATIONS DU JUGE CONSTITUTIONNEL
Question n°1. Quelles sont les obligations d’un membre du Conseil constitutionnel ?
Réponse. De façon générale, le membre du Conseil constitutionnel a une obligation de réserve. Entre autres, il lui est interdit, pendant la durée de sa fonction, de prendre aucune position publique sur les questions ayant fait, ou susceptibles de faire l’objet de décisions de la part du Conseil. Il leur est également interdit de consulter sur lesdites questions et ce, même après la cessation de leur fonction. (Article 5 alinéa 1 de la loi n°2004/005 du 21 avril 2004 portant statut des membres du Conseil constitutionnel).
Question n°2. Au sein de l’institution, les juges constitutionnels sont-ils soumis à une autorité hiérarchique, si oui, laquelle ?
Réponse. Il n’existe pas de rapport hiérarchique au sein de l’assemblée des conseillers, seulement, le Président du Conseil peut être considéré comme leur supérieur hiérarchique.
V. DROITS DU JUGE CONSTITUTIONNEL
Question n°1. Les juges constitutionnels bénéficient ils d’avantages particuliers ?
Réponse. En dehors des avantages matériels (véhicule de fonction, chauffeurs, personnel de sécurité et du personnel domestique, etc.), il n’existe pas d’autres avantages particuliers. Dans tous les cas, seul le Règlementintérieur du Conseil constitutionnel, en attente de parution, nous éclairera à ce niveau.
Question n°2. Les membres du Conseil constitutionnel conservent ils leurs droits de citoyens ?
Réponse. Oui, les juges constitutionnels conservent leurs droits de citoyens ; sous réserve bien entendu, des incompatibilités et des obligations édictées par les textes en vigueur.
Par: ATEMGA Judith Fabien
Master recherche en Droit public (Droit constitutionnel)
Chercheur au Centre de Recherche A Priori (Yaoundé-Cameroun)
DOCUMENTS DE PREPARATION
•- Alain Didier OLINGA, La Constitution de la République du Cameroun, 2e édition revue et corrigée, Presses de l’Université catholique d’Afrique centrale, 2013, 272 p.
•- ATEMGA Judith Fabien, La justice constitutionnelle au Cameroun, Mémoire de Master recherche en Droit public, Université de Ngaoundéré, 2018, 96 p.
•- Loi n° 2008/001 du 14 avril 2008 modifiant et complétant certaines dispositions de la loi n°96/06 du 18 Janvier 1996 portant révision de la Constitution du 02 Juin 1972.
•- Loi n°2004/004 du 21 avril 2004 portant organisation et fonctionnement du Conseil constitutionnel, modifiée et complétée par la loi n°2012/015 du 21 décembre 2012.
•- Loi n°2004/005 du 21 avril 2004 fixant le statut des membres du Conseil constitutionnel, modifiée et complétée par la loi n°2012/016 du 21 décembre 2012.